Orient Occident
Un projet de l’association du
Château de Bourbon-l’Archambault, propriété de la Fondation Saint-Louis
Avec le soutien de la Caisse des Dépôts, Mécène principal
En cas de mauvais temps, les concerts se tiendront
en l’église Saint-Georges de Bourbon-l’Archambault.
Les liens interculturels entre les sociétés orientales et occidentales au Moyen Âge sont essentiellement perçus de nos jours à travers le prisme d’une opposition, de conflits armés glorifiés dont, bien sûr, les Croisades des XIIe et XIIIe siècles. On les envisage encore souvent aujourd’hui comme un « choc des civilisations », ainsi que le prétendait Francis Fukuyama. Cependant, les peuples ne s’échangeaient pas que des ultimatums, mais plutôt et surtout des produits et des idées. La coopération entre les peuples l’a de tout temps emporté sur la guerre et la conquête.
Les frontières n’ont en effet jamais été imperméables à la transmission des connaissances, des techniques, des formes artistiques ou des savoirs scientifiques… Elles n’ont jamais empêché les peuples d’échanger, d’emprunter, voire d’adopter, grâce à la médiation de leurs savants ou de leurs artistes (quand ces interactions ne sont pas le fait d’un pouvoir politique volontariste) chez les uns et chez les autres ce qui leur paraissait bon ou beau.
C’est ainsi que les cultures humaines se sont ouvertes aux autres et se sont enrichies mutuellement. C’est ainsi qu’elles continuent de le faire.
L’un des exemples les plus célèbres de ces échanges, au Moyen Âge est que de nombreux monuments de la littérature politique de la Grèce antique auraient été à jamais perdus sans la traduction qu’en ont fait les intellectuels arabes. C’est par ce biais que les occidentaux les ont redécouverts. Il nous faut aussi rappeler combien la cour de Roger II de Sicile à Palerme, ville carrefour déjà multiculturelle et polyethnique depuis longtemps en ce premier XIIe siècle, était un creuset de connaissances et un excellent exemple de politique volontariste où savants, médecins, géographes, théologiens… orientaux ou occidentaux, chrétiens ou musulmans invités par un roi catholique, collaborent dans la capitale du royaume normand de Sicile dans le but de partager leurs connaissances et de faire progresser la science. On se contentera de mentionner la présence à Palerme du grand géographe Al Idrissi, à qui Roger II avait commandé des cartes géographiques de toutes les parties du monde connues alors. Dans un autre contexte, on ne peut passer sous silence l’importance pour la pensée occidentale de l’apport des célèbres savants arabes Avicenne et Averroès ou des intellectuels juifs tels Maïmonide au XIIe siècle, de langue arabe, ou Rachi, le célèbre rabbin Champenois de Troyes.
L’art n’est pas en reste et l’on sait, pour ne citer que quelques exemples, combien la musique vénitienne s’imprègne de culture byzantine pendant le haut Moyen Âge, ou comment le flamenco reçoit l’héritage de la musique andalouse, elle-même très largement influencée par la musique modale des Arabes. Aussi, n’oublions pas l’œuvre des architectes d’Al Andalous et leurs magnifiques mosquées, palais et jardins, que l’on peut encore jalousement admirer de nos jours.
Si la réalité de ces échanges interculturels pluriséculaires n’est plus à démontrer, il n’est cependant pas inutile aujourd’hui d’en rappeler la portée. Le projet Orient/Occident voit le jour avec pour objectif de les illustrer en proposant au public une découverte de la création artistique extra-européenne, qui sera mise en parallèle avec des œuvres d’artistes occidentaux.
Orient Occident se veut être un label sous lequel seront placés des évènements culturels variés, organisés au fil des saisons à venir au château de Bourbon-l’Archambault. Mais dans un premier temps, entre autres formes artistiques, c’est la musique qui sera mise à l’honneur parce qu’elle touche peut-être plus directement les sensibilités. Nous inviterons des ensembles professionnels de musique traditionnelle, populaire ou savante, mais aussi d’autres qui se sont spécialisés dans la fusion de traditions musicales de diverses origines. Viendront ensuite des expositions, des conférences, des débats, des soirées cinéma… au gré des recherches, des rencontres et des opportunités.
Ce projet entend également montrer que le raffinement de nos cultures occidentales n’a rien à envier à celui des cultures de l’Est, dans leur grande beauté et leur extraordinaire diversité, pour une meilleure compréhension de ce qui nous est étranger, en espérant ainsi contribuer à une plus grande acceptation de l’altérité, de la pluralité de l’humain. Les cultures extrême-orientales, subsahariennes, celles des Amériques aussi, ne seront pas en reste et feront l’objet de notre attention dans un avenir que nous souhaitons proche.
Nous voulons enfin rappeler la permanence du genre humain, dans le temps comme dans l’espace. Une lettre d’amour, conservée au British Museum, adressée par une Egyptienne du deuxième millénaire avant n. è. à son galant parti conquérir la Nubie avec son Pharaon pourrait avoir été écrite aujourd’hui par n’importe qui sur la planète. Nous sommes des hommes et des femmes qui, quels que soient les époques considérées et les espaces étudiés, quelles que soient nos différences, exprimons les mêmes besoins, les mêmes sentiments : crainte, angoisse, espoir, amour, affection, joie et envie de bonheur… pour n’en citer que quelques-uns.
Le logo
Les deux O se superposent pour évoquer deux alliances symbolisant le mariage entre les peuples. Le mot Occident est à l’envers pour rappeler aux Occidentaux qu’ils ont encore trop tendance à penser un monde dont ils seraient le centre, voire le modèle, héritant souvent, à leur corps défendant, d’un passé impérialiste et colonialiste.
Le flyer des concerts du 21 juillet 2024
Le tableau utilisé pour illustrer cette plaquette (une Annonciation d’Andrea Previtali, datant du début du XVIe siècle, dont nous avons extrait un détail) reproduit comme très souvent dans la peinture occidentale tardomédiévale ou de la Renaissance un tapis oriental, lequel était alors très prisé en Occident. Entre autres usages qu’on en faisait, les tapis orientaux ont remplacé dès le milieu du XIVe siècle les nattes que l’on disposait en descente de lit dans les demeures cossues, signe indéniable d’échanges culturels et commerciaux au long cours. Les peintres occidentaux reproduisent très tôt dans leurs tableaux des tapis persans ou provenant du Moyen Orient, qui tantôt apparaissent comme des tentures, ou recouvrant la balustrade d’un balcon… On les retrouve aussi représentés sous un trône ou un dais. Ces œuvres d’art que sont ces magnifiques tapis ont orienté les formes et les motifs privilégiés en Europe pendant toute la période.